Le Conseil d’administration de la Banque africaine de développement (BAD) a validé la création de la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique, une institution novatrice, qui va considérablement améliorer l’accès de l’Afrique aux technologies qui sous-tendent la fabrication de médicaments, de vaccins et d’autres produits pharmaceutiques, indique un communiqué de la banque panafricaine, parvenu au site ma.lapresse.it.
“Il s’agit d’une grande avancée pour l’Afrique qui doit se doter d’un système de défense sanitaire, basé sur trois grands domaines : la relance de l’industrie pharmaceutique africaine, le renforcement des capacités africaines de fabrication de vaccins et la mise en place d’infrastructures de soins de santé de qualité en Afrique” a déclaré le président du Groupe de la BAD, Akinwumi Adesina, cité par le communiqué.
Lors du Sommet de l’Union africaine qui s’est tenu à Addis-Abeba en février 2022, les dirigeants africains avaient appelé la Banque africaine de développement à aider à créer cette Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique. Plaidant en leur sens, Akinwumi Adesina avait alors souligné : “L’Afrique ne peut plus sous-traiter la sécurité sanitaire de ses 1,3 milliard de citoyens et la confier à la bienveillance d’autrui.” Avec cette initiative audacieuse, la Banque africaine de développement tient ses engagements.
Cette décision ouvre de nouvelles perspectives sanitaires à l’Afrique qui, depuis des décennies, subit le fardeau de plusieurs maladies et pandémies comme le Covid-19, mais dont la capacité à produire elle-même ses médicaments et vaccins s’avère très limitée. L’Afrique importe plus de 70 % de l’ensemble des médicaments dont elle a besoin, s’acquittant ainsi d’une facture annuelle de 14 milliards de dollars.
Les efforts déployés au niveau mondial pour développer rapidement la fabrication de produits pharmaceutiques essentiels, comme les vaccins dans les pays en développement – en Afrique en particulier –, pour en élargir l’accès, se sont révélés entravés par la protection des droits de propriété intellectuelle et des brevets sur les technologies, le savoir-faire, les procédés de fabrication et les secrets commerciaux.
Les entreprises pharmaceutiques africaines n’ont pas la capacité de dépistage ni de négociation, non plus que la marge de manœuvre nécessaires pour ferrailler avec les entreprises pharmaceutiques mondiales. Force est de constater qu’elles ont été marginalisées et laissées pour compte dans les innovations pharmaceutiques mondiales sophistiquées. Récemment, 35 entreprises ont signé une licence avec l’américain Merck pour produire le Nirmatrelvir, un médicament contre le Covid-19. Aucune n’était africaine.
A ce jour, l’Afrique ne compte sur le terrain aucun organisme à même d’appuyer la mise en œuvre pratique des droits de propriété intellectuelle liés au commerce (ADPIC) sur les licences non exclusives ou exclusives de technologies, de savoir-faire et de processus exclusifs.
Une lacune criante que va donc combler la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique. Car une fois établie, celle-ci sera composée d’experts d’envergure internationale en matière d’innovation et de développement pharmaceutiques, de droits de propriété intellectuelle et de politique de santé. Faisant office d’intermédiaire transparent, elle sera chargée de promouvoir et de négocier les intérêts du secteur pharmaceutique africain auprès des multinationales pharmaceutiques et d’autres pays du Sud, afin de partager les technologies, le savoir-faire et les procédés brevetés protégés par la propriété intellectuelle.
“Même avec la décision de l’Organisation mondiale du commerce sur la dérogation aux accords ADPIC, des millions de personnes meurent – et continueront très probablement de mourir –, faute de vaccins et de protection efficace”, a déclaré Adesina, ajoutant que la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique “offre une solution pratique et va permettre de faire pencher en faveur de l’Afrique l’accès aux technologies, aux connaissances, au savoir-faire et aux processus jusque-là exclusifs”.
L’Organisation mondiale du commerce (OMC) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont toutes deux salué la décision de la Banque africaine de développement.
“La Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique est une réflexion et une action novatrices de la Banque africaine de développement”, a reconnu la directrice générale de l’OMC, Mme Ngozi Okonjo-Iweala, pour qui la Fondation “fournit une partie de l’infrastructure nécessaire pour qu’une industrie pharmaceutique émerge en Afrique”.
“La création de la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique par la Banque africaine de développement change la donne, a renchéri le directeur général de l’OMS Tedros Ghebreyesus, en accélérant l’accès des entreprises pharmaceutiques africaines aux technologies et au savoir-faire protégés par la propriété intellectuelle en Afrique”.
Priorité sera donnée aux technologies, aux produits et aux processus dévolus aux maladies et pandémies prévalentes en Afrique, actuelles et à venir. Elle a aussi pour objectifs de renforcer les compétences humaines et professionnelles dans le secteur, l’écosystème de recherche et de développement, et d’améliorer les capacités de production des usines et la qualité réglementaire des produits pour répondre aux normes de l’Organisation mondiale de la santé.
Si la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique est créée sous les auspices de la Banque africaine de développement, elle fonctionnera en toute indépendance, collectant des fonds auprès de diverses parties prenantes – gouvernements, institutions de financement du développement et organisations philanthropiques.
La Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique sera basée au Rwanda. Entité à bénéfices communs, la Fondation jouira de ses propres structures de gouvernance et de fonctionnement. Elle encouragera et conclura des alliances entre sociétés pharmaceutiques étrangères et africaines.
De concert avec les gouvernements africains et les centres d’excellence en recherche et développement, la Fondation œuvrera à renforcer l’écosystème d’innovation pharmaceutique et vaccinale en Afrique et à développer les compétences nécessaires à l’essor du secteur.
Elle permettra une coordination plus étroite des différentes initiatives de fabrication de médicaments et de vaccins existantes au niveau régional, en tirant parti des synergies et des partenariats engagés à l’échelle panafricaine.
La Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique travaillera en étroite collaboration avec la Commission de l’Union africaine, la Commission de l’Union européenne, l’Organisation mondiale de la santé, la Communauté de brevets sur les médicaments, l’Organisation mondiale du commerce, les organisations philanthropiques, les agences et institutions bilatérales et multilatérales. Secteurs public et privé des pays développés et des pays en développement seront, eux aussi, fortement incités à collaborer.
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